L’intérêt supérieur de l’enfant?

Voilà bien une drôle d’expression qui a refait surface dans le débat public. Le ministre français annonce que l’instruction en famille doit tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant et que ses services distribueront éventuellement des autorisations en tenant compte de celui-ci.

En résumé certains esprits supérieurs s’arrogent le droit de déterminer mieux qu’une famille qu’ils ne connaissent pas l’intérêt supérieur de Maëlle, Théo, Youri ou Mohamed et d’autoriser leurs parents à les éduquer! On mesure le progrès!

Le sous-entendu de tout cela est premièrement que les parents ne sont pas les mieux placés pour déterminer l’intérêt de leurs enfants mais bien plus que l’enfant est par nature irresponsable et que seul un adulte étranger peut être garant de son intérêt supérieur. Que cet adulte cède quotidiennement à des petits plaisirs comme fumer ou boire a contrario de l’intérêt supérieur pour sa santé n’y change rien. Que cet adulte travaille sous le joug d’une hiérarchie tatillonne lui occasionnant stress, burn-out, parfois démission voire suicide, est sans doute la preuve de sa capacité à toujours prendre en compte l’intérêt supérieur pour sa santé physique et mentale. N’en doutons pas.

Bien plus l’enfant serait incapable de mesurer que manger trop de chocolat peut occasionner un mal de ventre, que de se jeter d’un mur de huit mètres de haut est dangereux, que d’insulter quelqu’un est socialement inapproprié. Bref nos enfants sauvages et leurs parents étant incapables de mesurer l’intérêt supérieur, ils devront interrompre leur cycle naturel de sommeil chaque matin pour aller se le faire expliquer par un adulte épuisé dans une classe surchargée, un masque sur le visage. L’intérêt supérieur de l’enfant est drôlement surprenant quand on n’a pas l’habitude. On comprend qu’il soit confié à des professionnels.

Avez-vous déjà vu des sauvages?

Il y a 325 ans, le massacre de Lachine | Le Devoir

Le premier ministre du Québec, François Legault est né en 1957. Quand il est entré à l’école en 1962 on lui a distribué des manuels scolaires. L’un d’eux aurait pu être « Mon livre de français » dans lequel on apprenait à lire avec des textes reflétant les compromis sociétaux et donc des programmes scolaires de l’époque. Extrait (p 179 du manuel de 4ème année, CM1):

« Avez-vous déjà vu des sauvages? Peut-être que non. Il faut dire qu’ils sont rares les sauvages aujourd’hui dans nos régions. Et puis, ceux qui restent sont bien différents de ceux d’autrefois. La religion catholique, voyez-vous, les a bien changés. Notre sainte religion arrange tant de choses!

Les sauvages du temps de Champlain, du Père de Brébeuf, de Dollard des Ormeaux, étaient bien méchants. Mais les Iroquois étaient certainement les pires de tous. Ah! ceux-là, si vous les aviez rencontrés dans les bois et que vous eussiez été seuls, sans votre papa ou vos grands frères pour vous défendre, ils vous auraient pris, amenées dans leur village, et là, ils vous auraient mangés, après vous avoir fait souffrir longtemps »

Les autochtones apprécieront! Mais qu’ils se rassurent tout le monde est servi. À la page des conjugaisons on peut s’exercer avec les verbes du 2ème groupe comme « obéir ». Extrait p.269

« Conjuguez à tous les temps de l’indicatif:

J’obéis comme un esclave nègre, tu obéis comme un esclave nègre… »

En France le ministre Blanquer est né en 1964, sa vision des sauvages est bien différente, notre sainte république arrange tant de choses!

 » La première des libertés c’est d’interagir avec d’autres hommes, quand il n’y a pas cette liberté on devient un enfant sauvage » Blanquer à propos de l’Ief. (22/01/2021), Les clichés ont la vie dure.

Liberté À Défendre (L.A.D)

Les militants qui s’installent dans les bocages pour sauvegarder une part de notre environnement toujours plus menacé par la bétonisation ne sont pas des privilégiés qui ont le temps, parce qu’ils en ont le loisir, les ressources intellectuelles et financières, de défendre la jouissance de leur villégiature. Ce sont des gens qui prennent leur temps, leur argent et leurs ressources pour venir défendre un droit public, une terre à sauvegarder pour le bien de tous et de chacun. Pour cela ils créent des Zones à Défendre par tous et pour tous.

Les familles qui se battent pour la sauvegarde de la liberté éducative et du droit à éduquer leurs enfants sont dans cette même situation de défendre une liberté universelle. Nous sommes en présence d’une Liberté à Défendre, une L.A.D qui a besoin du soutien de tous et de chacun. Les débats sur l’école ses réussites et ses échecs sont un autre sujet. Les libertés ne sont pas concurrentes, elles sont occurrentes

Grenelle de l’éducation ou réunion syndicale?

Je découvre avec grand étonnement les 10 thèmes du Grenelle de l’éducation auxquels on nous propose de contribuer:

1 Revalorisation des enseignants

2 Écoute des enseignants

3 Accompagnement des personnels

4 Collégialité des enseignants

5 Formation des enseignants

6 Gouvernance des établissements

7 Déconcentration et autonomie de l’équipe éducative

8 Mobilité des enseignants

9 Les outils numériques pour l’enseignement

10 Protection des professeurs et valeurs de la République

Est-ce moi qui ai des problèmes de vue où le mot enfant n’apparaît jamais ni dans les intitulés ni dans les descriptifs détaillés, le mot élève est à peine évoqué? Comment prendre part à cette réunion syndicale de la condition enseignante si l’on ne fait pas partie de la profession? N’est-ce pas étonnant que les thèmes de l’autonomie des enfants, de leur motivation, de leur capacité à s’insurger contre une autorité injuste, leur droit d’expression, leurs souffrances, leurs rêves, leurs envies, les projets familiaux, le harcèlement, la phobie scolaire, l’abandon scolaire, la diversité des choix éducatifs, les alternatives, la place des arts, de l’activité physique, du contact avec la nature, la place du choix des enfants… ne soient jamais évoqués dans un Grenelle de l’éducation? Tout cela me paraît ubuesque!