L’éternelle domination adulte!

Aujourd’hui il neige, les écoles sont fermées. Mon fils échappe donc à sa 11ème visite chez le directeur depuis le début de l’année. Cela n’avait pas l’air de le traumatiser, il m’a dit l’autre jour « L’objectif de 10 est atteint maintenant c’est juste pour le fun ».

Voilà l’objet de sa comparution à venir. Il y a dans la cours d’école une sorte de container  en métal pour ranger du matériel. Bien sûr le toit du container est très facilement accessible mais interdit par le règlement de l’école. Lylhèm se fait un plaisir de grimper dessus en toute occasion. Arrivant hier en fin d’après-midi pour récupérer mes enfants épuisés, je trouve Lylhèm perché sur le dit container. Un employé de l’école (le responsable d’entretien) lui intime de descendre. Lylhèm demande pourquoi. L’homme lui rappelle le règlement mais Lylhèm lui répond que le règlement ne s’applique pas puisque la cloche a sonné et que l’école est finie. Bien sûr la petite provocation fait son effet et l’homme s’énerve, le fait descendre, le coince contre une barrière et lui dit « Moi, on ne m’obstine pas! » Expression couramment employée au Québec pour signifier « on ne me conteste pas ». Il se propose de l’amener chez le directeur pour régler cette affaire. C’est là que je suis intervenu.

Bien sûr, l’escalade de Lylhèm est provocatrice, il y a sans doute bien mieux à faire. Mais son argument est assez intéressant. La discipline scolaire s’exerce-t-elle en dehors des heures d’école? Étant donné que la cours est accessible en tous temps (soir, fin de semaine, vacances) le règlement s’applique-t-il la nuit? L’autorité du personnel scolaire s’exerce-t-elle en dehors des heures d’école? La réponse de l’adulte n’est pas à la hauteur de ce questionnement. Revenons précisément sur ce « Moi, on ne m’obstine pas! » Que veut dire exactement cette phrase?

« Dans la vie, personne ne conteste jamais ce que je dis, en aucune circonstance » ou plus probablement « aucun enfant ne peut contester les dires d’un adulte »? Que Lylhèm ait le droit ou non de monter sur le container est un autre débat. Ce qui m’interpelle ici c’est ce pouvoir adulte qui n’a d’autre excuse à donner pour sa légitimité que sa propre existence! J’ai donc bien hâte de voir comment l’école développera, comme elle le prétend, l’esprit critique, la sensibilité au consentement, l’autonomie des enfants.

Les belles rencontres d’hiver!

Me voilà de retour dans l’hiver québécois avec un petit -28 degrés aujourd’hui. Je garde le souvenir de nos rencontres, des belles équipes et de leurs questionnements, de leurs trouvailles pédagogiques que ce soit avec l’école démocratique de l’Orneau, celle de Lille ou de Paris, on constate les mille et un déploiements de la créativité éducative. Je garde en tête nos questions toujours vives sur comment aller mieux et plus loin ensemble. Vous avez été des centaines à habiter ma semaine en Europe, merci à vous. Ma prochaine escapade sera du 21 mars au 1 Avril au Maroc. Je vous donnerai des nouvelles.

Un beau moment de partage!

Merci à l’équipe de l’école démocratique de l’Orneau et aux participants de la soirée d’hier. Une belle soirée à renouveler. Je serai à Lille demain et à Paris samedi! Au plaisir de vous retrouver bientôt

Ça commence demain!

Je reprends ma pipe et mon chapeau, mon sac de voyage et mon bâton de pèlerin pour venir échanger demain à Gembloux près de Bruxelles avec L’école démocratique de L’Orneau puis à Lille le 6 février avec L’école Sudburry Lilloise puis à Paris le 9 février avec L’école démocratique de Paris pour toute une journée de réflexions et d’ateliers! Un voyage court mais intense, j’ai très hâte de vous rencontrer! Il reste encore quelques places.

Je hais les sciences de l’éducation

Comme Lévis-Strauss commençait son « Tristes tropiques » en déclarant « Je hais les voyages et les explorateurs » je peux dire que je hais les sciences de l’éducation quand elles se résument aux sciences de l’enseignement voire à la science de la gestion de classe. Et puis d’abord l’éducation est un art, infiniment perfectible, non reproductible en laboratoire et trop sensible pour entrer dans les dogmes d’une science. Qu’y a-t-il de plus différent d’une classe qu’une autre classe, d’un enfant qu’un autre enfant? Que serait un pédagogue qui ne serait pas en chemin, en hors piste, en expérimentation dans le vertige des possibilités humaines? Le pédagogue qui ne s’interroge plus sur les grands fondements de sa pratique est forcément mauvais. Il croit que ce qu’il sait est suffisant. Il ne cherche plus. D’abord parce qu’il sait qu’il sait mais surtout, et c’est un effet mécanique, parce qu’il ne sait pas qu’il ne sait pas.

Des pans entiers, des siècles de réflexion, des centaines d’auteurs sont occultés par les sciences de l’éducation ou seulement mentionnés à titre de balise historique. L’essentiel du cursus s’emploie à donner aux futurs professeurs le guide de survie scolaire, composé essentiellement d’un adultisme désuet.

Enfin, Je hais les sciences de l’éducation parce qu’elles sont exclusivement réservées aux adultes. L’enfant n’y est présent que comme réceptacle de la réflexion adulte. Et toute sa curiosité, son enthousiasme, son énergie, son courage, sa poésie, son impertinence, son esprit d’aventure ne sont perçus que comme des obstacles à la bonne gestion de classe et à la réalisation de l’image d’Épinal qu’une professeure se faisait du métier lorsque petite,  première de la classe, elle rêvait déjà d’enseigner devant un public captif et silencieux.