Tournée avril 2022 (suivi des noms des personnes contacts) – 18 avril en Belgique. Gourdinne Catherine Parée – 20 avril Muttersholz (67) Manuèle LangVirginie Bertrand – 21 avril Saint-Aubin sur Gaillon (27) Pauline Wallet – 22 avril Paris (École Démocratique de Paris) Yazid Arifi – 23 et 24 avril Salon du livre de Paris – 25 avril Drulhe (12) Celine Demeyer – 26 avril Le puy en Velay (43) Maïté Pozza – 28 avrilClermont-Ferrand (63) Audrey Moron Leger – 29 avril Domarin (38) Tom Zielinski
Tout est relatif
Je ne sais quoi en penser, mais voilà qu’un petit documentaire de la radio publique française (France Culture) avait les meilleurs sentiments pour des écoles clandestines, pour filles, musulmanes, organisées par les parents à l’insu des autorités. Non, non, vous ne rêver pas, le tout était présenté avec le ton de l’espoir, de la saine résistance, de la libération. Les journalistes avaient l’air de trouver l’idée formidable.
Certes, cette école était à Kaboul! Mais j’ai repensé à cette vague mensongère de loi contre le séparatisme visant à interdire aux parents de France d’éduquer leurs enfants sous prétexte qu’il était pêché de se soustraire à l’école de la République. Les ministres de service n’avaient qu’un seul exemple, répété ad nauseam, on a trouvé une école clandestine de filles voilées!
Les familles n’ont eu de cesse de répéter qu’éduquer ses enfants est un droit naturel, et que si un régime autoritaire s’installait en France il trouverait bien pratique qu’aucun enfant ne puisse échapper à sa propagande. Elles ont rappelé au gouvernement que si l’école est obligatoire en Allemagne c’est par une loi hitlérienne de 1939. Mais rien n’y fit, l’État est bienveillant et puis c’est tout! Certes nous ne sommes pas à Kaboul, mais on dirait que ce petit documentaire me laisse un peu songeur. L’histoire a montré que le sauvage, l’oppresseur, le dictateur c’est toujours l’autre, aucun risque que ça puisse être nous. Certes nous avons été tour à tour, esclavagistes, bonapartistes, colonisateurs, pétainistes, assimilateurs… mais ça c’était avant.
Du burn-out au burn-in!
« Consacrer toute notre énergie, être complètement, s’améliorer, faire le bien, le bon… » voilà le genre de propos que l’on pourrait trouver dans n’importe quel livre de management néo-libéral. Ce champ sémantique demeure tout à fait adapté à la recherche de bénéfices financiers, à l’atteinte d’objectifs boursiers, aux volontés de n’importe quel DRH. Ici seul le sujet est différent. On ne parle pas d’économie mais d’une personne. Demeure l’injonction de faire toujours plus, toujours mieux. Même la petite fille qui dessine sur le mur au grand désespoir de sa mère le fait avec une règle pour créer des formes géométriques parfaites. Mais quel enfant dessine comme ça? Comprendre que le bonheur ne réside pas dans la grosse maison, la grosse voiture ou la grosse télé est une première étape. Mais quelle différence y a-t-il entre se donner des objectifs de réussite extérieure et s’accabler d’objectifs intérieurs. L’épuisement professionnel laisse place à l’épuisement d’être soi.
Sous couvert d’humanisme, un dessin comme celui-ci ne fait que reproduire la catéchèse néo-libérale adaptée à la personne, conduisant du burn-out au burn-in. Les buts changent mais l’épuisement, l’injonction, la culpabilité demeurent. Il est temps que le capitalisme du développement nous foute sincèrement la paix. Cessez de vouloir vous améliorer, laissez le balancier trouver son point d’équilibre, ce sera déjà beaucoup.
Besoin d’humanité
Je le reconnais bien volontiers mes posts, articles, livres ne sont pas de tout repos pour ceux qui les reçoivent. Ils peuvent être perçus comme des coups de poing d’interrogation, des critiques un peu tranchantes. Mais au moins ils appellent échanges, discussions, argumentations. Notre époque semble avoir décidé de partager les gens, non comme s’ils n’étaient pas d’accord sur un match écouté ensemble, avec ses analyses, ses partisans, ses commentaires… mais bien comme s’ils n’avaient pas vu le même match, le même sport. Dans ces conditions comment échanger, comment s’enrichir mutuellement? Les discussions semblent appartenir à des paradigmes étrangers les uns aux autres. Cela renvoie chacun d’entre nous à une abyssale solitude.
Tout est devenu, clivant. Les irréconciliables Québec-Montréal au hockey ou Paris-Marseille au football, qui étaient alors vécus comme d’amicales concurrences, comme de rares espaces où l’on pouvait se permettre d’être un peu idiot, partial, aveugle… se sont répendus et aujourd’hui les silos sont devenus des forteresses. Les discussions se sont transformées en outrages où d’éternels agresseurs, complotistes, imbéciles s’adressent à d’éternelles victimes, offensées, sensibles. Les irrespectueux et les irrespectés semblent représenter l’ensemble de la population.
Où sont les cafés, les engueulades entre amis, les réconciliations, les tapes sur l’épaule, les embrassades et les invectives de comptoir. Où sont les franches camaraderies de zinc, les orateurs à la coupe pleine, les César, Panisse… Je m’ennuie de cette tranche d’humanité qui n’offensait personne définitivement et qui, gorgés de pudeur et de fierté, déclinaient toutes les nuances d’une vie sociale.
J’espère que nous saurons réinventer les chemins du désaccord amical, de la dispute bras dessus-bras dessous, de l’invective fraternelle, de la contradiction humaniste, de la colère théâtralisé, du dramatique convivial, de la larme heureuse. Passez boire un coup à la maison, nous avons un monde à retricoter.
Le vélo girafe, symbole scolaire
Je croise souvent dans la rue des parents à vélo, suivis par leurs enfants sur ce genre de dispositif: le vélo girafe. À première vue cela paraît un bon compromis. L’enfant pas encore assez habile ou à l’aise pour avoir son propre vélo s’initie à la route. Je trouve cet instrument typique de la fausse bienveillance de notre époque.
L’ enfant sur sa girafe en forme de vélo ne peut choisir la direction, son guidon est fictif. Il ne peut choisir non plus d’accélérer, de freiner, de s’arrêter. Il n’a aucune recherche d’équilibre à faire, la girafe tient toute seule. Dans ces conditions, peut-on prétendre que l’enfant fait du vélo? Et si ce n’est pas le cas pourquoi cette forme trompeuse, cette fausse promesse aux apparences de vélo?
Quel système ou dispositif peut prétendre être bon pour l’enfant, le conduire à l’émancipation, si l’enfant ne peut trouver lui-même ses propres équilibres, choisir ses directions, adapter son rythme, s’arrêter, repartir? L’école me semble ressembler pas mal à ce « vélo’ girafe, un lieu ressemblant à de l’éducation dans lequel l’enfant ne choisit finalement rien. Quoi qu’il en soit, le « vélo » girafe est un bon entraînement pour l’école. D’ailleurs la plupart des parents qui l’utilisent, y conduisent leurs enfants. Belle cohérence!