Comme Lévis-Strauss commençait son « Tristes tropiques » en déclarant « Je hais les voyages et les explorateurs » je peux dire que je hais les sciences de l’éducation quand elles se résument aux sciences de l’enseignement voire à la science de la gestion de classe. Et puis d’abord l’éducation est un art, infiniment perfectible, non reproductible en laboratoire et trop sensible pour entrer dans les dogmes d’une science. Qu’y a-t-il de plus différent d’une classe qu’une autre classe, d’un enfant qu’un autre enfant? Que serait un pédagogue qui ne serait pas en chemin, en hors piste, en expérimentation dans le vertige des possibilités humaines? Le pédagogue qui ne s’interroge plus sur les grands fondements de sa pratique est forcément mauvais. Il croit que ce qu’il sait est suffisant. Il ne cherche plus. D’abord parce qu’il sait qu’il sait mais surtout, et c’est un effet mécanique, parce qu’il ne sait pas qu’il ne sait pas.
Des pans entiers, des siècles de réflexion, des centaines d’auteurs sont occultés par les sciences de l’éducation ou seulement mentionnés à titre de balise historique. L’essentiel du cursus s’emploie à donner aux futurs professeurs le guide de survie scolaire, composé essentiellement d’un adultisme désuet.
Enfin, Je hais les sciences de l’éducation parce qu’elles sont exclusivement réservées aux adultes. L’enfant n’y est présent que comme réceptacle de la réflexion adulte. Et toute sa curiosité, son enthousiasme, son énergie, son courage, sa poésie, son impertinence, son esprit d’aventure ne sont perçus que comme des obstacles à la bonne gestion de classe et à la réalisation de l’image d’Épinal qu’une professeure se faisait du métier lorsque petite, première de la classe, elle rêvait déjà d’enseigner devant un public captif et silencieux.
Merci de ce rappel. Que je sais que je ne sais pas!